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C’était une grosse bringue pour fêter le Nouvel an. Un rassemblement auquel 2.500 personnes avaient assisté après dix mois de restrictions imposées par l’épidémie galopante de Covid-19. A Lieuron, en Ille-et-Vilaine, la rave party célébrant le passage en 2021 était devenue un sujet de conversation national, s’invitant même à la table du réveillon des ministres les plus proches d’Emmanuel Macron. Pendant plusieurs jours, les organisateurs de cette mystérieuse teuf étaient parmi les personnes les plus recherchées de France. Une partie de la population conspuait une attitude « dangereuse » susceptible de créer un important cluster dans un pays vivant sous restrictions. Six mois plus tard, c’est à l’occasion de violents affrontements survenus à Redon que le sujet de la teuf revenait sur le haut de la pile des discussions de comptoir. On y évoquait la perte d’une main, l’accès rendu impossible aux secours par la préfecture ou encore la destruction illégale du matériel par les forces de l’ordre.
Le boom des free parties
Ces deux événements ont rappelé à la France l’existence d’une communauté underground méconnue et souvent mal perçue. Ils ont aussi engendré une quantité impressionnante d’articles relatant la moindre teuf réunissant 50 personnes au fin fond des Monts d’Arrées ou de l’Aube. Perçues comme un espace de liberté par ses adeptes, les raves sont-elles plus nombreuses en ces temps où les interdictions se multiplient ? Difficile de le savoir. « Depuis le mois de mai, à la fin du 3e confinement, il y a effectivement eu une reprise importante des free parties. Leur nombre est difficile à évaluer car pour combien de fêtes découvertes y a-t-il de fêtes qui passent en dessous des radars ? », interroge Fabrice, membre de l’association Techno +. Une « Nuit des Meutes » s’est déroulée le week-end du 31 juillet en soutien aux blessés de la teuf de Redon.
Rave party à Redon : « Du jamais vu »… Pourquoi les gendarmes ont-ils détruit le matériel des teufeurs à coups de hache ? https://t.co/Bt5ZzMPM9d via @20minutesRennes pic.twitter.com/C5xeoNDcEm
— 20 Minutes Rennes (@20minutesrennes) June 21, 2021
Avant l’épidémie, le ministère de l’Intérieur avait recensé 4.000 teufs par an, soit un peu moins de 100 par week-end en moyenne. Mais elles fleurissent surtout l’été. « Depuis trois ou quatre ans, on connaît un vrai boom des free. Mais c’est un milieu exigeant, qu’il faut connaître pour avoir les infos, où il faut s’investir, où l’on sait tout à la dernière minute. Ça ne convient pas à tout le monde et ça nous préserve clairement d’une surfréquentation », poursuit Victor Lacroix, porte-parole de Media’son.
Click Here: ADELAIDE CROWS 2019 MEN’S HOME GUERNSEYDe la marge à la norme avec le confinement
Le témoignage de cet ancien du milieu semble confirmer la tendance. Oui la rave a la cote. Et ce n’est pas l’apparition récente de restrictions sanitaires, que certains jugent liberticides, qui vont endiguer le phénomène. « Les free parties sont à la marge depuis trente ans. Mais depuis le premier confinement de mars 2020, c’est devenu la norme pour tous les types de fêtes puisqu’elles sont toutes devenues clandestines du jour au lendemain. Mais c’est le concept même du mouvement : une résistance festive. Les amateurs de free risquent depuis trente ans des amendes, des poursuites judiciaires, la perte de leur permis de conduire, des violences physiques, la réprobation morale de leur entourage pour continuer à aller dans ce type de fêtes car ils y trouvent un espace de libertés et de résistances qui n’existe nulle part ailleurs », poursuit le membre de Techno +.
Chaque veille de week-end, de nombreux préfets prennent pourtant des arrêtés interdisant les rassemblements musicaux à caractère festifs. Leur cible n’est pas directement nommée mais tout le monde sait lire entre les lignes. Les représentants de l’État veulent éviter que des dizaines, voire centaines de jeunes et moins jeunes viennent poser leur son dans des champs ou hangars désaffectés de leur territoire. La répression subie à Redon aurait pu en décourager certains. Elle semble au contraire avoir galvanisé toute une communauté.
« La teuf, c’est être libre. Il y a une ambiance particulière, un sentiment de liberté que je ne retrouve nulle part ailleurs », résume un adepte des soirées.
« Attention cependant à ne pas coller d’étiquette antivax ou antimasque aux teufeurs. Dans la situation actuelle, le mouvement a gardé son caractère inclusif et y accueille tout le monde », rappelle Techno +. Le traitement subi par les organisateurs de la bringue du Nouvel an à Lieuron avait pourtant mis un frein à l’engouement général, et de nombreuses voix s’étaient élevées pour dénoncer l’acharnement judiciaire et médiatique. « Un mec de 22 ans qui n’a pas de casier risque dix ans de prison pour avoir fait danser des gens le soir du Nouvel an. C’est du délire ! Et c’est très grave », nous avait alors confié Emilie, une teufeuse bretonne.
Deux fois plus de réclamations contre la répression
Le sentiment d’une plus forte répression semble se traduire dans les faits. En 2020, le Fonds de soutien juridique des sound system a traité « deux fois plus de dossiers qu’en 2019 ». Alors même que le nombre de fêtes avait considérablement diminué, du fait du Covid-19. La nuit d’affrontements à Redon, couplée à la destruction du matériel de sonorisation a paradoxalement « détendu » certaines autorités qui semblent moins pressées de couper le son que par le passé. Incompris et souvent mal perçu, le monde de la rave n’a pas perdu son ambition. Résister, à sa manière : en dansant au rythme de la techno.