Depuis plusieurs semaines, des violences xénophobes ont fait officiellement une dizaine de morts en Afrique du Sud. Comment analyser un tel phénomène ? Les réponses de Marc Gbaffou, ingénieur ivoirien, qui a vécu à Johannesburg de 1997 à 2018. Il est l’un des cofondateurs de l’ONG panafricaine African Diaspora Forum (ADF), fondée après les attaques de 2008 qui avaient fait plus de 60 morts. Cette ONG s’efforce de mener un travail de terrain pour prévenir ces violences.Franceinfo Afrique : selon les autorités, les violences xénophobes ont fait, ces dernières semaines, une dizaine de morts. De son côté, Human Rights Watch rapporte que “plus de 200 personnes, pour la plupart des chauffeurs routiers étrangers, ont été tuées en Afrique du Sud depuis mars 2018”. Qu’en est-il exactement ?Selon nos chiffres, ils seraient en tout deux millions (pour une population de 56,7 millions d’habitants en 2017, NDLR). Proportionnellement, il n’y en a donc pas plus que dans d’autres pays.Vous n’hésitez pas à parler de “tactique politique”…

Patrouille policière après des pillages dans le township d’Alexandra à Johannesburg (Afrique du Sud), le 3 septembre 2019 (REUTERS – MARIUS BOSCH / X03827)

Comment expliquez-vous cela ?En arrivant au pouvoir, les dirigeants actuels ont fait beaucoup de promesses. Le peuple, qui a connu l’apartheid, a ainsi été trompé par le pouvoir en place. Les citoyens ont cru qu’on allait construire des maisons gratuites pour tout le monde, fournir l’eau et l’électricité gratuitement. Comme rien ne vient, les gens sont très fâchés. Alors ils extériorisent leur colère en tuant des migrants. Cette colère est récupérée. Pour les politiques, c’est un moyen de se reconnecter avec les citoyens.Pour autant, on ne peut pas faire abstraction de la crise économique qui touche l’Afrique du Sud…Toute police a des services de renseignement qui lui permettent d’avoir des informations. Personne ne peut lui reprocher de vouloir lutter contre la criminalité, comme cela se fait partout dans le monde. Mais elle ne dit pas la vérité.Certains parlent de tentative de déstabilisation du président Ramaphosa…

Le président sud-africain Cyril Ramaphosa, àGenève, le 10 juin 2019. (REUTERS – DENIS BALIBOUSE / X90072)

D’ailleurs, pendant cette période, il n’y a jamais eu de loi à l’Assemblée nationale pour lutter contre la xénophobie, comme cela existe dans de nombreux pays. Il n’y a pas eu de texte contre la discrimination. Pour la justice, ce vide juridique crée une confusion, rend complexe le jugement des actes xénophobes.Quel est le rôle des chauffeurs routiers sud-africains et de leur syndicat ATDF ?Les Sud-Africains entendent donner une belle image de leur pays. Ils n’aiment pas qu’on parle de ces événements à l’extérieur. Ils n’apprécient que l’on dise que le pays, qui a connu la discrimination sous l’apartheid, la pratique aujourd’hui. Et que les mêmes qui ont connu l’apartheid sont devenus les auteurs de ces attaques. Alors, le Nigeria arrive à parler parce que c’est une grande puissance africaine. Mais certains petits pays, qui dépendent de l’aide sud-africaine, ont peur.Dans ce contexte, les enjeux économiques sont importants. L’Afrique du Sud craint des actions comme celles qui visent MTN. Il faut savoir que cette compagnie a 65 millions de clients au Nigeria. Soit plus que la population sud-africaine !Vous-même, qui n’êtes pas sud-africain et avez quitté le pays en 2018, avez-vous été touché par ces événements ? Click Here: cheap south sydney rabbitohs jersey