Identifier, par un simple test urinaire, les patients susceptibles de rejeter leur greffon de rein plusieurs semaines voire plusieurs mois avant qu’ils ne présentent les premiers symptômes est désormais possible, affirment les auteurs d’une étude publiée dans le New England Journal of Medicine.
Greffe de rein : un test urinaire pour détecter le risque de rejet.
Le test permettrait également aux médecins de déterminer ceux dont l’organisme est en train de rejeter le greffon et d’affiner le dosage des médicaments immunosuppresseurs administrés aux patients greffés.Mieux évaluer le risque de rejet du rein grefféLa transplantation d’un rein est réalisée chez les personnes en insuffisance rénale terminale, ne pouvant survivre sans des séances de dialyse, longues et pénibles. Pour les patients qui obtiennent un greffon (3 044 greffes de rein ont été réalisées en 2012 selon les données des derniers Etats Généraux du Rein), le rejet est le risque le plus redouté.L’équipe du Dr Manikkam Suthanthiran est la première à avoir créé, dès 2001, un test urinaire déterminant le profil d’expression des gènes. Ce test repose sur le dosage des taux d’ARN messagers (ARNm), des molécules produites par les gènes lors de leur traduction en protéines. Les chercheurs ont en effet découvert que le niveau d’expression de trois ARNm (CD3ε mRNA, IP-10 mRNA, and 18S rRNA) peut déterminer si un organe risque ou est en train d’être rejeté. Ces trois ARNm indiquent que des lymphocytes T sont recrutés pour détruire ce que l’organisme reconnaît comme un tissu étranger.Le test consiste à additionner le niveau d’expression urinaire des trois ARNm ; il doit être répété dans le temps et, si le score obtenu s’élève, cela traduit une activation du système immunitaire contre le
rein greffé, explique le Dr Suthanthiran. A l’inverse, un score qui reste constant suggère que le patient ne présente pas de risque de rejet.Un test urinaire plus efficace que le test sanguinPour évaluer l’efficacité de leur test, les chercheurs ont mené un essai clinique en 2006 auprès de 485 transplantés rénaux suivis dans cinq centres médicaux. Ils ont collecté 4 300 échantillons d’urine au cours de la première année suivant la transplantation, commençant au 3ème jour. L’analyse urinaire a confirmé que les trois biomarqueurs permettaient de distinguer les transplantés rénaux chez lesquels une biopsie avait confirmé le rejet du greffon, de ceux chez lesquels la biopsie n’indiquait aucun signe de rejet ou de ceux ne manifestant aucun signe de rejet et pour lesquels une biopsie était inutile, rapportent-les chercheurs dans le NEJM.Il existe déjà un test sanguin capable d’identifier le rejet : il consiste à doser le taux de créatinine dans le sang, reflet de la fonction rénale. Mais d’après le Dr Darshana Dadhania, professeur de médecine et de chirurgie au Weill Cornell Medical College, qui a participé à l’étude, le test sanguin est nettement moins spécifique que le test urinaire. “Le taux de créatinine peut s’élever pour de multiples raisons, comme une simple déshydratation du patient, et lorsque cela arrive, nous devons alors procéder à une biopsie ultra-invasive pour examiner le rein et déterminer la cause“, explique-t-elle.D’après les résultats de l’essai, le test urinaire a conduit à des taux de faux-positifs et de faux-négatifs faibles, pour une efficacité finale de 85 %, nettement supérieure à celle du test sanguin.Amélie PelletierSource : “Urinary-Cell mRNA Profile and Acute Cellular Rejection in Kidney Allografts“ – N Engl J Med 2013; 369:20-31, DOI: 10.1056/NEJMoa1215555 (
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